Le compte n’y est pas :
Il faut 3/5 des Députés et des Sénateurs pour permettre l’adoption sans référendum du Traité dit « Simplifié » de Nicolas Sarkozy . Pour obliger Sarkozy à faire passer son texte par voie référendaire, il faut donc que 364 élus se prononcent contre la réforme constitutionnelle. Actuellement, le compte n’y est pas. Il pourrait être atteint si quelques « non-inscrits » proches de Dupont-Aignan ne votaient pas la réforme constitutionnelle et, surtout, si la Gauche dite « de gouvernement » respectait le vote référendaire du 29 mai 2005, « son projet socialiste » arrêté au Mans, les engagements de campagne présidentielle de sa candidate (proposition 91) et, enfin, si tous ses élus se comportaient, tout simplement, en « démocrates» ; aujourd’hui, certains d’entre eux – et non des moindres – cherchent à nous convaincre que, sur l’Europe « il faut avancer », ce que, disent-ils, le vote du « traité simplifié » permettrait. Substitution du fond à la forme d’une part, puisque ce qui est considéré comme valeur positive pour l’Europe correspond à ce que les élus de l’Assemblée ou du Sénat pensent - sans mandat de leurs électeurs -, et forcing pour une Europe qui « avancerait » d’autre part, alors que la démarche adoptée pour faire passer un texte et ses orientations libérales, coûte que coûte, ne pourra que détourner davantage les européens de la construction de l’Union : en 2004 , 220 millions de citoyens européens sur 375 millions d’électeurs inscrits n’avaient pas participé au vote des Parlementaires Européens ; en 2009, quel taux d’abstention atteindra t’on si les référendums français et néerlandais de 2005 n’étaient pas respectés ? Est-ce une Europe des citoyens, que l’on construit ? Un peu plus d’un mois avant le vote décisif au Congrès, ce n’est plus seulement sur la forme qu’il faut argumenter pour convaincre les grands électeurs mais sur le fond : la lettre, que nous devons adresser à tous les parlementaires, doit répondre à 2 questions :
- Si l’Europe doit être construite, elle ne peut être que démocratique. Comment la construire pour qu’elle soit celle des citoyens?
- Que veut dire une Europe, qui « avancerait » ?
Aussi, je propose que nous nous liguions de nouveau pour adresser à tous les parlementaires des 2 Assemblées la lettre suivante :
Madame, Monsieur,
Vous êtes des élus de la République Française ; vous êtes nos représentants ; la démocratie doit donc guider votre action. Une occasion se présente pour que vous nous le prouviez : le vote au Sénat et à la Chambre des Députés, puis au Congrès, de la réforme de la Constitution (article 88-1) permettant l’adoption, par voie parlementaire, du « Traité Simplifié Européen » (TME ou Traité Européen Modifié signé à Lisbonne, le 13 décembre dernier, par les chefs des exécutifs des 27 Etats de l’Union Européenne). Nous observerons votre comportement et nous en tirerons les conséquences.
L’UE « avancera t’elle » mieux et plus vite si ce Traité, en étant adopté, « débloquait la situation ? ». Ou ne s’agit-il que d’un motif pour fonder, par un acte très officiel, le caractère « libéral économique » de l’Union ? Tout d’abord l’Europe fonctionne, même à 27 ; un éminent spécialiste, Renaud Dehousse, professeur à Sciences-Pô, l’écrit dans le Monde du 21 juin 2007 : « Avant le grand élargissement de mai 2004, il fallait en moyenne 18 mois entre le dépôt d’une proposition par la Commission et son adoption par le Conseil et, éventuellement, le Parlement. Depuis l’entrée des dix nouveaux Etats membres, ce délai est passé en moyenne à… moins de 12 mois. En outre, on ne vote pas moins, et même un peu plus qu’avant. Les craintes d’un blocage institutionnel,étaient donc infondées. » C’est aussi, à quelques nuances près, la position du Centre for European Policy Studies, rapportée par le Financial Times : « Le rythme actuel du processus de décision est identique à celui d’avant 2004 … » Et ce n’est qu’en 2014 et même en 2017, que le TME prévoit d’appliquer les nouvelles règles de définition de la majorité au Conseil des ministres (55 % des Etats et 65 % de la population de l’Union), si un Etat-membre le demandait (exigence de la Pologne). Alors, s’il n’y a pas « blocage », pourquoi adopter ce texte sans les citoyens européens ? La réponse est simple : « ce procédé permet, comme dans beaucoup de situations institutionnelles au niveau de l’UE, de ne pas fonder une décision sur un vote des européens ! » Ni la Commission ni la BCE, entre autres, ne sont, en effet, contrôlées par les citoyens européens : « fera t’on avancer l’Europe » en séparant ses décisions des choix de ses citoyens ? La rapprochera t’on ainsi des peuples européens ? Leur donnera t’on ainsi l’envie d’aller voter (220 millions abstentionnistes sur 375 millions inscrits à la dernière élection des « euro-députés » en 2004)? Précisons qu’en novembre 2007 un sondage Louis Harris publié par le Financial Times indiquait que 76 % des Allemands, 75 % des Britanniques, 72 % des Italiens, 65 % des Espagnols souhaitaient participer à un référendum pour le nouveau traité !
L’UE « avancerait-elle mieux » et avec plus de pouvoir dans le Monde si elle adoptait ce TME? Aurait-elle plus de poids, par exemple, au sein d’un Quartette censé accélérer les négociations entre Israël et les Palestiniens, en entérinant sa plus grande intégration dans l’OTAN (futur article 27-7 du TUE), alors qu’elle est si peu audible lorsqu’il est question de réformer l’ONU pour lui restituer son rôle premier dans tous les conflits du Monde ? Est-ce l’augmentation des dépenses militaires des Etats, qui la composent (futur article 27-3 du TUE), qui cautionneront son « droit d’ingérence » sur le sol d’autres Etats au prétexte de lutte contre le terrorisme (futur art 28 TUE), alors qu’elle ne changerait pas de stratégie au sein de l’OMC quand il est question d’Accord Général sur le Commerce des Services ou de Souveraineté Alimentaire ou de subventions déguisées à ses exportations agricoles?
Le droit des travailleurs de l’UE « avancera t’il mieux » avec une Charte qui n’est plus intégrée au Traité, qui ne crée aucune compétence et tâche nouvelle pour l’UE (art 6 et déclaration 31) et qui ne s’impose pas à 2 Etats ? Leur qualité de vie sera t’elle mieux garantie, avec un TME affirmant d’emblée l’abandon du principe de la « concurrence libre et non faussée », mais obligeant les Etats à abroger toute règle nationale, qui serait contraire aux règles de la concurrence, en matière de services (cf l’article 86 du traité) comme de droit du travail ? La qualité de vie des européens ne serait elle pas mieux prise en compte si, à la place des Services d’Intérêt Economique Général (SIEG) et même des Services d’Intérêt Général (SIG), les Services Publics étaient maintenus hors marché, ce que ne garantit nullement le texte, que vous vous apprêtez à voter? La politique sociale européenne serait-elle plus attractive pour les travailleurs si elle donnait une véritable perspective d’harmonisation progressive des législations sociales et fiscales, en fonction des Produits Intérieurs Bruts et des évolutions des données économiques et sociales de chaque pays ?
L’économie de l’Europe ne se donnerait-elle pas plus d’atouts si la Banque Centrale Européenne avait d’autres objectifs que la maîtrise d’une inflation imaginaire (art 3 TUE modifié) et si, sous le contrôle des Etats, elle permettait une politique d’investissement ouvrant la voie à l’emploi ? Mais la BCE reste indépendante (art 108 TFUE) ; et la Déclaration 17 réaffirme « son attachement à la stratégie de Lisbonne » et préconise le renforcement de la compétitivité. Elle invite « à une restructuration des recettes et des dépenses publiques, tout en respectant la discipline budgétaire conformément aux traités et au Pacte de stabilité et de croissance ». Nous demeurons donc dans une logique comptable, toute libérale, et sans objectif politique ambitieuse pour l’emploi.
Vous le savez donc bien : ce qui est en jeu, ce n’est pas enfin de « faire avancer l’Europe » dans ses compétences et dans ses pouvoirs sur les décisions du Monde ; non, ce qui est en jeu, c’est, avec « des précautions cosmétiques » de présentation (Expression de Valéry Giscard d’Estaing), c’est de reprendre l’ancien projet de constitution, de rendre l’UE toujours plus libérale dans son fonctionnement économique, en faveur du Capital et au détriment de ceux qui ne vivent que de leur travail, c’est à dire le plus grand nombre …
Alors, sachez le : plus que jamais, alors qu’un sondage très récent révèle que 71% des Français désirent participer à la décision qui les concerne, après le référendum sans appel de 2005, nous vous observerons et nous tiendrons compte de votre respect des règles et résultats démocratiques précédents pour déterminer nos choix pour les votes futurs.
Signatures avec références précises.
Pour être efficace, c’est à dire déterminer 364 élus nationaux, cette lettre doit être diffusée à tous les élus de l’Assemblée Nationale et du Sénat – dont les adresses figurent sue le site de leur assemblée – dans les plus brefs délais.
Telle est ma proposition : aujourd’hui, c’est à dire à 15 jours du 1° vote des Chambres et à un peu plus d’un mois du vote du Congrès, forme et fond doivent être associés pour convaincre.
Albert Richez
jeudi 27 décembre 2007
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